Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 12.djvu/269

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caractère, mais qui n’entreprit rien en sa faveur.

On disait hautement qu’il ne fallait pas être surpris qu’un étranger sans bien pressât l’exécution d’une entreprise où il mettait si peu du sien, qui devait lui assurer un poste honorable, et où le pis aller pour lui était de se retrouver ce qu’il était. Colomb, qui ne put ignorer ce langage, allait faire les derniers préparatifs de son départ lorsque Grenade ouvrit ses portes aux Espagnols. Saint-Angel profita de cette heureuse conjoncture pour représenter à la reine le tort qu’elle faisait à sa propre gloire en refusant d’augmenter la puissance et l’éclat de sa couronne, sans compter que les avantages qu’elle paraissait négliger pouvaient tomber entre les mains de quelque autre prince et devenir pernicieux à l’Espagne. Il mit tant de force dans son discours, que cette princesse, déjà ébranlée par les sollicitations de Quintanille, se rendit à leur conseil ; et, pour ménager les finances que la guerre avait épuisées, elle déclara que son dessein était d’engager pour la nouvelle expédition une partie de ses pierreries. Saint-Angel, dans le mouvement de sa joie, répondit que cette ressource n’était pas nécessaire, et qu’il fournirait la somme de son propre fonds. La reine fit rappeler aussitôt Colomb, qui était déjà au port de Pinos, à deux lieues de Grenade. Son ressentiment ne l’empêcha point de retourner sur ses pas, et l’accueil qu’il reçut à la cour