Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 13.djvu/114

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

encore le caractère et les usages de ces peuples, ne purent voir sans quelque effroi la campagne inondée d’une armée si nombreuse. Ils apprirent qu’elle était de quarante mille hommes, Cortez sentait le péril dans lequel il s’était engagé ; cependant, loin d’en être abattu, il anima ses gens par un air de joie et de fierté : il leur fit prendre un poste au pied d’une petite éminence, qui ne leur laissait point à craindre d’être enveloppés par-derrière, et d’où l’artillerie pouvait jouer librement. Pour lui, montant à cheval avec tout ce qu’il avait de cavaliers, il se jeta dans un taillis voisin, d’où il se proposait de prendre l’ennemi en flanc lorsque cette diversion deviendrait nécessaire. Les Américains ne furent pas plus tôt à la portée des flèches, qu’ils firent leur première décharge, après quoi, suivant leur usage, ils fondirent avec tant d’impétuosité sur le bataillon espagnol, que les arquebuses et les arbalètes ne purent les arrêter ; mais l’artillerie faisait une horrible exécution dans leur corps d’armée ; et comme ils étaient fort serrés, chaque coup en abattait un grand nombre. Ils ne laissaient pas de se rejoindre pour remplir les vides qui se faisaient dans leurs bataillons ; et poussant d’épouvantables cris, ils jetaient en l’air des poignées de sable par lesquelles ils espéraient cacher leur perte. Cependant ils avancèrent jusqu’à se trouver en état d’en venir aux coups de main ; et déjà les Espagnols commençaient à croire que la partie n’était pas égale, lorsque les cavaliers,