Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 13.djvu/20

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sur eux de divers côtés avec des cris épouvantables. La Cosa fut un des premiers qui furent surpris dans des cabanes où ils étaient à se reposer : il se défendit vaillamment jusqu’à ce qu’ayant vu tomber la plupart de ses gens, et sentant lui-même la force du venin dans une infinité de blessures qu’il avait reçues des flèches américaines, il dit à un brave Castillan qui se trouvait près de lui, et qui n’avait point encore été blessé : « Sauvez-vous, s’il se peut ; Dieu vous a conservé pour rendre compte de notre malheur au commandant. » Ce soldat fut le seul en effet qui eut le bonheur d’échapper à la fureur des ennemis.

Ojéda ne fut pas moins maltraité. Après avoir perdu tous ses gens dans un enclos où ils avaient été percés de flèches, il ne dut la vie lui-même qu’à son agilité, qui le fit passer comme un éclair au milieu des ennemis ; il se sauva dans l’épaisseur des bois et des montagnes, sans autre guide que le hasard, et courant toujours vers la mer. Les Castillans de l’escadre, surpris de ne pas recevoir de ses nouvelles, visitèrent la côte dans leurs barques, et le trouvèrent à peu de distance du rivage, sous des mangles fort épais, où il s’était retiré l’épée à la main, et son bouclier percé de trois cents coups de flèches. La fatigue, la douleur et la faim l’avaient tellement affaibli, qu’il fut long-temps sans pouvoir prononcer un seul mot : il ne fut rappelé à la vie qu’à force de soins, et par la force naturelle de sa constitution. Cette défaite