Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 13.djvu/339

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honteux pour des guerriers d’occuper leurs mains à porter de l’or pendant qu’elles devaient être employées à la défense de leur vie et de leur honneur. Cependant, la plupart des soldats paraissant touchés de cette perte, et n’approuvant point un dessein si généreux, il ajouta quelques mots par lesquels il fit concevoir que chacun pouvait prendre ce qu’il se croyait capable de porter dans sa marche. C’était donner trop de confiance à la discrétion du soldat. Aussi la plupart se chargèrent-ils avec une imprudente avidité, qu’ils reconnurent trop tard, et qui leur coûta cher.

Il était près de minuit lorsque les Espagnols sortirent du quartier. Leurs sentinelles et leurs coureurs n’ayant découvert aucune apparence de mouvement du côté de la ville, ils marchèrent quelque temps à la faveur des ténèbres et de la pluie, dans un silence auquel la soumission n’eut pas plus de part que la crainte. Le pont volant fut porté jusqu’au premier canal, et l’avant-garde s’en servit heureusement : mais le poids de l’artillerie et des chevaux ayant engagé cette masse dans la boue et dans les pierres, on jugea qu’il serait difficile de la retirer assez promptement pour la transporter aux autres ouvertures avant la fin de la nuit. Les officiers donnaient leurs ordres, et l’ardeur était extrême à les exécuter. Cortez, qui était passé avec la première troupe, la fit avancer sous le commandement de ses chefs, pour dégager la chaussée par degrés, et demeura sur le bord