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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 15.djvu/301

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qu’il fit porter avec précaution sur les épaules d’un homme jusqu’à son embarquement.

De Loxa à Jaën, on traverse les derniers coteaux de la cordilière. Dans toute cette route, on marche presque sans cesse par des bois où il pleut chaque année pendant onze mois, et quelquefois l’année entière. Il n’est pas possible d’y rien sécher. Les paniers couverts de peau de bœuf, qui sont les coffres du pays, se pourissent et rendent une odeur insupportable. La Condamine passa par deux villes qui n’en ont plus que le nom, Loyola et Valladolid ; l’une et l’autre opulentes et peuplées d’Espagnols il y a moins d’un siècle, mais aujourd’hui réduites à deux petits hameaux d’Indiens ou de métis, et transférées de leur première situation. Jaën même, qui conserve encore le titre de ville, et qui devrait être la résidence du gouverneur, n’est plus aujourd’hui qu’un village sale et humide, quoique sur une hauteur, et renommé seulement par un insecte dégoûtant, nommé garrapata, dont on y est dévoré. La même décadence est arrivée à la plupart des villes du Pérou éloignées de la mer, et fort détournées du grand chemin de Carthagène à Lima. Cette route offre quantité de rivières qu’on passe les unes à gué, les autres sur des ponts, et d’autres sur des radeaux construits, dans le lieu même, d’un bois fort léger, dont la nature a pourvu, toutes les forêts. Les rivières réunies en forment une grande et très-rapide, nommée Chinchipé,