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tous les habitans ont une couleur si pâle et si livide, qu’on les croirait relevés de quelque grande maladie. Leurs actions mêmes s’en ressentent par une mollesse singulière, et le ton de leur voix par sa lenteur. Ceux qui arrivent de l’Europe conservent pendant trois ou quatre mois leurs forces et leur couleur ; mais, par degrés, ils deviennent semblables aux anciens habitans, c’est-à-dire qu’avec une assez bonne santé, ils paraissent en manquer.

» Ils sont sujets d’ailleurs à plusieurs sortes de maladies. Celle qui menace les Européens, et qu’on a déjà nommée chapetonade, par allusion au nom de chapeton, dont on ne nous apprend pas l’origine, emporte souvent une partie des équipages après l’arrivée des vaisseaux. Sa nature est peu connue. Elle vient à quelques-uns de s’être trop refroidis ; à d’autres, de quelque indigestion ; d’où suit un vomissement mortel, accompagné quelquefois d’un si furieux délire, qu’on est obligé de lier le malade pour l’empêcher de se déchirer en pièces. Il expire au milieu de ses transports, comme dans une espèce de rage.

» Une autre maladie fort commune à Carthagène et dans toute sa juridiction, c’est la lèpre, qu’on y nomme mal de Saint-Lazare. Ceux qui l’attribuent à la chair de porc, qui est la nourriture ordinaire du pays, ne font pas attention que cet aliment n’est pas moins commun dans d’autres contrées de l’Amérique, et que, par conséquent, il en faut chercher la