Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 16.djvu/31

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peuplade a son gouverneur, ses régidors et ses alcades. Les gouverneurs sont élus par les habitans mêmes, et confirmés par les curés, qui se réservent ainsi le pouvoir de rejeter ceux dont les qualités ne conviennent point à leurs fonctions. Les alcades sont nommés tous les ans par les corrégidors, qui veillent avec eux au maintien de la paix et du bon ordre. Mais comme ces magistrats, dont les lumières sont fort bornées, pourraient abuser de leur autorité, il leur est défendu d’infliger la moindre peine sans la participation du curé, qui éclaircit l’affaire, et qui livre l’accusé au châtiment, lorsqu’il le juge coupable. C’est ordinairement la prison, ou le jeûne. Si la faute est grave, la peine sera quelques coups de fouet ; et c’est la plus grande parmi des gens qui ne commettent jamais d’assez grands crimes pour mériter une plus sévère punition. L’horreur pour le vol, pour le meurtre et les autres excès de cette nature, est établie dans toutes les peuplades par les exhortations continuelles des missionnaires. Les châtimens mêmes sont toujours précédés d’une remontrance qui dispose le coupable à les recevoir comme une correction fraternelle ; et ces ménagemens de douceur et d’affection mettent le curé à couvert de la haine et de la vengeance de celui qu’il fait punir. Aussi, loin d’être haïs de leurs Indiens, ces pères en sont si chéris et si respectés, que, quand ils les feraient châtier sans raison, ces âmes simples, qui croient leurs directeurs incapables d’er-