Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 18.djvu/118

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froid du dehors faisait souvent tomber dans un évanouissement si profond ceux qui rentraient après avoir passé quelque temps à l’air, qu’ils étaient quelques minutes sans donner aucun signe de vie. Si la porte demeurait ouverte un moment, l’air froid du dehors entrait avec une violence sensible, et changeait les vapeurs des appartemens en neige mince. La chaleur extraordinaire du dedans ne suffisait pas pour garantir les fenêtres et les murs de neige et de glace. Les couvertures des lits se trouvaient ordinairement gelées le matin ; elles tenaient à la partie du mur qu’elles touchaient, et l’on était surpris de voir l’haleine condensée sur les draps en forme de gelée blanche.

« Le feu du poêle, continue le même voyageur, n’était pas plus tôt éteint que nous sentions toute la rigueur de la saison. À mesure que l’air intérieur se refroidissait, le bois de charpente, que la grande chaleur avait dégelé, se gelait avec une nouvelle force, et se fendait avec un bruit continuel, souvent aussi fort que celui d’un coup de fusil. Il n’y a point de fluide qui résiste au froid de ce pays. La saumure la plus forte, l’eau de vie, et l’esprit de vin même, gèlent aussitôt qu’ils sont exposés à l’air : cependant l’esprit de vin ne se consolide point en masse ; mais il se réduit presqu’à la consistance des onguens. Toutes les liqueurs moins fortes deviennent solides en se gelant, et rompent leurs vaisseaux, soit de bois, d’étain ou de cuivre. La glace des rivières avait plus de