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il s’en trouve qui vendent leurs enfans, leurs parens et leurs voisins. Pour cette perfidie on s’adresse à ceux qui ne peuvent se faire entendre des Français. Ils les conduisent au comptoir pour y porter quelque chose, et, feignant que ce sont des esclaves achetés, ils les vendent, sans que ces malheureuses victimes puissent s’en défier, jusqu’au moment qu’on les enferme ou qu’on les charge de chaînes. Un vieux Nègre, ayant résolu de vendre son fils, le conduisit au comptoir. Mais ce fils, qui se défia de ce dessein, se hâta de tirer un facteur à l’écart et de vendre lui-même son père. Lorsque ce vieillard se vit environné de marchands prêts à l’enchaîner, il s’écria qu’il était le père de celui qui l’avait vendu. Le fils protesta le contraire, et le marché demeura conclu ; mais celui-ci, retournant en triomphe, rencontra le chef du canton qui le dépouilla de ses richesses mal acquises, et vint le vendre au même marché. Tous ces crimes sont la suite d’un plus grand, celui de les acheter.

Quantité de petits Nègres des deux sexes sont enlevés tous les jours par leurs voisins, lorsqu’ils s’écartent dans les bois, sur les chemins, ou dans les plantations, pour chasser les oiseaux qui viennent manger le millet et les autres grains. Dans le temps de la famine, un grand nombre de Nègres se vendent eux-mêmes pour s’assurer du moins la vie.

Leur pauvreté est extrême. Ils ont pour tout bien quelques bestiaux. Les plus riches n’en