Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 2.djvu/382

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plus tôt vu le sang, qu’il sauta sur la main, et la déchira en un instant jusqu’au poignet.

Il paraît qu’on ne doit pas plus se fier à la familiarité des panthères qu’à celle des despotes.

L’équipage de Philips fut cruellement ravagé par la maladie. Il en prend occasion de s’étendre sur les désagrémens du commerce des esclaves, quand la contagion se met parmi eux. « Quel embarras, dit-il, à leur fournir régulièrement leur nourriture, à tenir leurs logemens dans une propreté continuelle ! et quelle peine à supporter non-seulement la vue de leur misère , mais encore leur puanteur qui est bien plus révoltante que celle des blancs ! Le travail des mines, qu’on donne pour exemple de ce qu’il y a de plus dur au monde, n’est pas comparable à la fatigue de ceux qui se chargent de transporter des esclaves. Il faut renoncer au repos pour leur conserver la santé et la vie ; et si la mortalité s’y met, il faut compter que le fruit du voyage est absolument perdu, et qu’il ne reste que le cruel désespoir d’avoir souffert inutilement des peines incroyables. » Il pouvait y joindre le remords d’un crime inutile. Mais qui pourrait être tenté de plaindre les malheurs de l’avarice et de la tyrannie ?

Le père Loyer, jacobin de l’Annonciation de Rennes en Bretagne, nommé par le pape préfet des missions apostoliques pour la côte de la Guinée, partit en 1700 sur un vaisseau français qui reportait en Afrique un prétendu