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après l’avoir obtenu des Vétères, et la rivière du même nom, étant passés entre les mains des Issinois, ont pris le nom d’Issini, de leurs nouveaux possesseurs ; et l’ancien territoire des Issinois, qu’on nomme encore le Grand-Issini, pour le distinguer de l’autre, dont il n’est éloigné que de dix lieues, est demeuré sans habitans. On voit que ces peuplades nègres ont été souvent refoulées les unes sur les autres, et qu’un même lieu a souvent changé d’habitans comme autrefois notre Europe. Quiconque possède peu, change aisément de demeure. Ce sont les richesses et la police qui fixent une nation.

La pierre d’aigris, qui tient lieu de monnaie parmi les barbares, est fort estimée d’eux, quoiqu’elle n’ait ni lustre ni beauté. Les Kompas, nation voisine, la brisent en petits morceaux qu’ils percent fort adroitement, et qu’ils passent dans de petits brins d’herbe pour les vendre aux Vétères. Chaque petit morceau est estimé deux liards de France. Il se trouve peu d’or sur cette côte.

Les Vétères se bornent à la pêche de la rivière, parce qu’ils n’ont pas la hardiesse de s’exposer aux flots de la mer sur une côte qui est ordinairement fort orageuse. Ils se font des réservoirs où le poisson entre de lui-même, et dans lesquels il prend plaisir à demeurer. Ce sont de grands enclos de roseaux, soutenus par des pieux dans les endroits où la rivière a moins de profondeur. Ils n’y laissent qu’une ouver-