Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 21.djvu/125

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de la part des gens du vaisseau. La situation des frères Moraves avait bien changé depuis vingt ans. Dans les premiers voyages qu’ils firent au Groënland, comme on ne voyait en eux que des hommes grossiers, sans naissance, sans bien, sans éducation, qui obtenaient de la cour un passage gratuit sur les vaisseaux marchands, sans qu’on sût à quel titre et pour quel objet, ces mendians étaient accueillis avec très-peu d’égards et beaucoup de mépris. On les raillait, on les insultait, et les sarcasmes, disent-ils, rejaillissaient jusque sur la religion qu’ils allaient prêcher. Mais, en 1750, le commerce du Groënland ayant été donné à une compagnie royale, il fut réglé, pour ce qui concernait les missionnaires, que désormais, au lieu des franchises dont ils avaient joui jusqu’alors, ils paieraient un fret modéré. À cette condition les armateurs recherchèrent des passagers dont le transport, loin d’être à la charge des navigateurs, pouvait favoriser le commerce dans un pays où ils avaient beaucoup d’influence sur l’esprit des habitans. Aussi les trois frères reçurent toutes sortes de politesses et de marques d’attention, soit des officiers, soit de l’équipage du vaisseau sur lequel ils passèrent à la mission de Neu-Herrnhut. À peine y furent-ils arrivés, le 27 juin, que dès le 19 juillet suivant ils partirent avec quatre familles de Groënlandais, au nombre d’environ trente-six personnes, pour aller fonder une nouvelle église à Fisker-Fiord, près du comptoir de la colonie