Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 21.djvu/269

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homme, irrité, le perça de la sienne, qu’il lui laissa dans le corps. Il voulut tirer son épée ; mais il ne put en venir à bout, parce qu’il avait reçu une grave blessure au bras droit. Les Indiens, qui s’en aperçurent, se précipitèrent sur lui ; l’un d’eux lui asséna un si furieux coup de sabre sur la jambe gauche, qu’il le fit tomber sur le visage ; alors, ils le tuèrent à coups de lance. C’est ainsi que périt notre guide, notre lumière, notre soutien.

» Lorsqu’il tomba, et qu’il se vit accablé par les ennemis, il se tourna plusieurs fois vers nous pour voir si nous avions pu nous sauver. Comme il n’y avait aucun d’entre nous qui ne fut blessé, et que nous nous trouvions tous hors d’état de le secourir ou de le venger, nous gagnâmes nos canots. C’est donc à notre capitaine que nous dûmes notre salut, parce qu’au moment où il périt les insulaires se jetèrent en foule vers l’endroit où il était tombé.

» Cette malheureuse bataille se donna le 27 avril 1521, qui était un samedi, jour que le capitaine avait choisi lui-même, parce qu’il l’avait en dévotion particulière. Huit de nos gens et quatre Indiens baptisés périrent avec lui, et peu d’entre nous retournèrent à nos vaisseaux sans être blessés. Ceux qui étaient restés dans les chaloupes voulurent nous protéger avec les bombardes, mais la grande distance où ils étaient fut cause qu’elles nous firent plus de mal qu’à nos ennemis, qui cependant perdirent quinze hommes. »