Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 22.djvu/285

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trouvé dans une situation plus déplorable ; ils avaient jeté à la mer les deux tiers de leur monde ; et parmi ceux qui étaient demeurés en vie, il ne restait de force pour agir qu’aux officiers et à leurs valets. Depuis long-temps ils avaient été réduits à une pinte d’eau pour vingt-quatre heures ; et malgré cette économie, leur provision tirant à sa fin, ils étaient menacés de mourir bientôt de soif. Ce ne fut pas sans une peine extrême qu’après avoir louvoyé long-temps autour de l’île, ils surmontèrent les vents et les courans pour arriver au mouillage. Mais on continua de leur envoyer de l’assistance ; et ce soin n’empêcha pas qu’en entrant dans la baie leur nombre ne fût diminué des trois quarts. Mitchel, capitaine de ce malheureux vaisseau, raconta que, depuis qu’on l’avait perdu de vue, les vents l’avaient poussé jusqu’à Masa-Fuéro, à l’ouest de Juan-Fernandès ; que, découvrant de son bord plusieurs ruisseaux dans cette île, il avait envoyé sa chaloupe pour y faire de l’eau ; que le vent élevait de si grosses lames sur la côte, qu’il avait été impossible d’y aborder ; mais que cette tentative n’avait pas été tout-à-fait inutile, parce que la chaloupe était revenue pleine de poisson.

Vers le milieu d’août, les malades, qui étaient à peu près guéris, obtinrent la permission de quitter les tentes communes, où ils avaient été logés jusqu’alors, et de s’établir chacun dans leur hutte. On crut qu’étant séparés, ils pourraient se rétablir plus promptement, mais ils