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le péril augmente encore par la rapidité du flux, qui porte au sud-est, entre l’île de Tinian et celle d’Agnigan. Pendant les huit autres mois, c’est-à-dire depuis le milieu d’octobre jusqu’au milieu de juin, le temps est égal et constant.

Ces connaissances manquaient aux Anglais. Après s’être occupés à radouber leur vaisseau, ils donnèrent tous leurs soins aux malades, qui commençaient à se rétablir heureusement. Anson, attaqué lui-même du scorbut, s’était fait dresser une tente sur le rivage, où il vivait sans défiance. Cependant, comme on n’était pas loin de la nouvelle lune de septembre, une prudence nécessaire dans la mousson de l’ouest lui fit ordonner, pour la sûreté du vaisseau, que le bout des câbles fût garni des chaînes des grapins dans l’endroit où il tient aux ancres. Il les fit même revêtir, à trente brasses depuis les ancres, et à sept depuis les écubiers, d’une bonne hansière de quatre pouces et demi de tour. À ces précautions on ajouta celle d’amener la grande vergue et la vergue de misaine, pour laisser au vent moins de prise sur le vaisseau.

La nouvelle lune arriva le 18. Ce jour et les trois suivans se passèrent sans accident ; et quoique le temps fût orageux, on se reposait sur des mesures auxquelles il ne paraissait rien manquer ; mais le 22, un vent d’est qui s’éleva tout d’un coup avec une impétuosité surprenante rompit tous les câbles et jeta le vaisseau