Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 23.djvu/220

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vait été à trente brasses de l’entalingure ; notre ancre du sud-est était perdue, et nous tâchâmes inutilement de sauver l’ancre à jet dont la bouée avait coulé, et qu’il fut impossible de draguer. Nous guindâmes aussitôt notre petit mât de hune et la vergue de misaine, afin de pouvoir appareiller dès que le vent le permettrait.

» L’après-midi il se calma et passa à l’est. J’envoyai un bateau sonder dans le nord, afin de savoir s’il n’y aurait pas un passage ; ce qui nous eût mis à la portée de sortir presque de tout vent. Un malheur n’arrive jamais seul : comme nous étions tous occupés d’un travail auquel était attaché notre salut, on vint m’avertir qu’il y avait eu trois insulaires tués ou blessés dans leurs cases à coups de baïonnette ; que l’alarme était répandue dans le pays ; que les vieillards, les femmes et les enfans fuyaient vers les montagnes, emportant leurs bagages et jusqu’aux cadavres des morts ; et que peut-être allions-nous avoir sur les bras une armée de ces hommes furieux. Telle était donc notre position de craindre la guerre à terre au même instant où les deux navires étaient dans le cas d’y être jetés. Je descendis au camp, et, en présence du chef, je fis mettre aux fers quatre soldats soupçonnés d’être les auteurs du forfait : ce procédé parut les contenter.

» Je passai une partie de la nuit à terre, où je renforçai les gardes dans la crainte que les insulaires ne voulussent venger leurs compa-