Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 26.djvu/225

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suite, à l’entrée d’une plantation, une femme qui n’avait pas eu le temps de s’échapper ; elle nous offrit d’une main tremblante, et avec une extrême frayeur, un panier rempli d’yambous : l’effet de ces deux rencontres nous étonna. D’autres naturels qui se tenaient derrière les buissons remuaient leurs mains vers la grève, et nous firent signe de nous y rendre. Enfin, en sortant du bois, nous vîmes deux Indiens assis sur l’herbe, et tenant un de leurs compatriotes mort entre leurs bras ; ils nous montrèrent une blessure qu’il avait au côté, et ils dirent avec des regards touchans : Il est tué[1].

» On nous raconta au camp les détails de ce meurtre, et nous ne pûmes nous empêcher d’en gémir. Un insulaire avait voulu s’avancer au delà des limites que gardait la sentinelle ; probablement il n’était jamais venu sur cette grève, et ne connaissait point les défenses que nous nous étions permis de faire : le soldat de marine le repoussa durement parmi le reste de ses compatriotes, qui étaient déjà accoutumés à ce traitement injurieux, et qui s’y soumettaient : le nouveau venu refusa d’être dominé dans son propre pays par un étranger, et il se prépara à passer une seconde fois ces fatales bornes, uniquement peut-être pour montrer qu’il était le maître de marcher où il lui plaisait. La sentinelle l’ayant repoussé, il tendit son arc ; le soldat aussitôt lâcha son fusil, et tua un In-

  1. Ils exprimèrent cela d’une manière encore plus frappante par un mot de leur langue, markom.