mier état : l’arbre dont ils tiraient jadis leur vêtement ne croît plus dans cette nouvelle contrée ; leur retraite a été si brusque, qu’ils n’ont emporté avec eux ni plantes, ni graines, ni aucun des animaux domestiques dont ils employaient jadis les peaux ; ils sont cependant obligés de se procurer quelque couverture pour se préserver des rigueurs du climat et de l’inclémence du vent et de la pluie : ils se servent donc des graminées ou des filamens de quelque autre plante, ou des peaux d’oiseaux ou de phoques : la vie errante qu’ils mènent en cherchant leur subsistance les contraint à changer de demeure aussi souvent que le gibier ou le poisson deviennent rares ; ils croient que ce n’est pas la peine de bâtir des maisons vastes et commodes ; une hutte qu’on élève au besoin suffit pour les mettre à l’abri des vents froids, de la pluie, de la neige et de la grêle. Les vieillards conservent peut-être les noms et les idées des choses dont ils jouissaient autrefois ; mais leurs enfans en perdent le souvenir, et à la troisième ou quatrième génération, ils en oublient jusqu’aux noms : les nouveaux objets qu’ils découvrent, et dont ils commencent à se servir, les forcent à imaginer de nouveaux termes, tant pour les objets eux-mêmes que pour la manière dont ils les emploient ; c’est ainsi que leur langue elle-même s’altère. N’ayant d’autres moyens de subsister que la chasse et la pêche, ils sont obligés de vivre en petites tribus éloignées les unes des autres ; plus rap-
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