où le ressac est moins violent, parce qu’elle
est à l’abri du vent. Ce plan fut exécuté ; mais
les buffles étaient si intraitables et d’une force
si prodigieuse, que leur voyage et leur embarquement
furent très-longs et très-difficiles.
Pour les mener, on passa des cordes dans le
trou de leurs narines et autour de leurs cornes ;
mais l’aspect de nos gens les ayant irrités
de nouveau, ils devinrent si terribles, qu’ils
renversèrent les arbres auxquels nous fûmes
obligés souvent de les attacher : d’autres fois
ils déchirèrent le cartilage de leurs narines, et
ils s’échappèrent. Nos matelots auraient essayé
vainement de les rattraper, sans le secours de
quelques petits garçons qui vinrent à bout
d’approcher de ces animaux, et qui avec des
caresses ne tardèrent pas à apaiser leur fureur.
Lorsque enfin les buffles furent arrivés sur la
grève, le secours des petits garçons fut encore
indispensable ; ils entrelacèrent de cordes les
jambes de ces animaux, et ils vinrent à bout
de les renverser par terre : nous pûmes alors
les traîner dans les canots. On a lieu de s’étonner
de la douceur et même de l’affection que
montrent les buffles devant de petits enfans ;
mais ce qui n’est pas moins singulier, ils n’eurent
pas été vingt quatre heures à bord, qu’ils
devinrent très-apprivoisés. Je gardai longtemps
un mâle et une femelle, et ils jouaient
avec les matelots. Croyant qu’une race si forte
et si grosse, et dont quelques individus pesaient
sept quintaux, serait une acquisition
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HISTOIRE GÉNÉRALE