fuir, nos canots s’éloigner du rivage, puis passer
et repasser en silence entre les vaisseaux.
Je dois l’avouer, mon cœur conçut des pressentimens
sinistres. Un homme dont la vie m’était
si précieuse et si chère se trouvait au milieu
de la mêlée ; un spectacle si nouveau et si
effrayant m’alarma : je savais d’ailleurs que les
succès nombreux et constans des entrevues du
capitaine Cook avec les habitans de ces mers
lui avaient donné une extrême confiance : j’avais
toujours craint qu’il n’arrivât une heure malheureuse
où cette confiance l’empêcherait de
prendre les précautions nécessaires : je fus alors
frappé des dangers qui pouvaient en être la
suite, et l’expérience qui l’avait fait naître ne
suffit pas, pour me tranquilliser.
» Du moment où j’entendis les coups de fusil, mon premier soin fut d’assurer les insulaires rassemblés en foule autour du mur de l’édifice consacré, dont nous étions en possession, qu’on ne leur ferait point de mal, et que je voulais vivre en paix avec eux, quoi qu’il arrivât. Ce qu’ils avaient vu et ce qu’ils avaient entendu ne leur causait pas moins d’inquiétude qu’à nous. Nous demeurâmes dans cette position jusqu’au retour des canots aux vaisseaux. Le capitaine Clerke découvrant alors, à l’aide de sa lunette que nous étions environnés par les naturels du pays, et craignant qu’ils ne songeassent à nous attaquer, ordonna de leur tirer deux pierriers de quatre ; heureusement ces coups de canon, quoique bien ajustés, ne tuèrent et ne blessè-