Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 5.djvu/110

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

traiter, et celle de mendier les nécessités de la vie jusqu’à leur guérison. Dans cette extrémité, ils promirent entre eux, par un serment solennel, de vivre en bonne intelligence et de reconnaître pour leur chef un des neuf, qui serait choisi chaque mois par les huit autres, avec le pouvoir de régler leur conduite. Cet ordre se soutint constamment et servit beaucoup à soulager leur misère. Ce choix étant tombé sur Christophe Borralho, sa prudence leur fit distribuer les emplois qui se rapportaient au bien commun. Deux furent chargés de mendier dans la ville, deux autres d’aller à l’eau et d’apprêter les alimens. Le reste devait s’employer à couper du bois dans une forêt voisine, non-seulement pour l’usage domestique, mais pour tirer quelque profit de ce qu’on pourrait vendre.

Ils étaient à Quansy depuis plus de huit mois, lorsqu’un mercredi, troisième jour de juillet 1544, un peu après minuit, il se répandit dans la ville un bruit et des mouvemens si terribles, qu’on aurait cru le monde au dernier moment de sa ruine. On était informé par des voies certaines que le khan de Tartarie venait fondre sur Pékin avec la plus nombreuse armée qu’on eût jamais vue depuis que les hommes s’entre-déchirent par des guerres[1] ; et qu’un détachement de

  1. Pinto confesse que, depuis Adam, on n’avait pas vu d’armée semblable. « Il y avait, dit-il, vingt-sept rois qui, tous ensemble, menaient dix-huit cent mille hommes, dont