Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 5.djvu/138

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l’un de mes deux compagnons, était le seul des trois qui fût armé d’une arquebuse. Il s’était attaché à la conserver soigneusement dans nos malheurs, parce qu’il s’en servait avec beaucoup d’adresse. Pendant les premiers jours on y avait fait d’autant moins d’attention, qu’il en avait fait peu d’usage, ou qu’il s’écartait pour la chasse ; et, ne nous figurant pas que cette arme fût encore inconnue au Japon, il ne nous était pas tombé dans l’esprit qu’elle pût nous faire un nouveau mérite aux yeux des insulaires. Cependant, un jour que Zeimoto s’arrêta dans un marais voisin de la ville, où il avait remarqué un grand nombre d’oiseaux de mer, et où il avait tué plusieurs canards, quelques habitans, qui ne connaissaient pas cette manière de tirer, en eurent tant d’étonnement, que leur admiration alla bientôt jusqu’au nautaquin. Il s’occupait alors à faire exercer quelques chevaux. Son impatience le fit courir aussitôt vers le marais, d’où il vit revenir Zeimoto, son arquebuse sur l’épaule, accompagné de deux Chinois qui portaient leur charge de gibier. Il avait eu peine à comprendre les merveilles qu’on lui avait annoncées, et la vue d’une sorte de bâton qu’il voyait porter au Portugais ne suffisait pas pour l’en éclaircir. Lorsque Zeimoto eut tiré devant lui deux ou trois coups, qui firent tomber autant d’oiseaux, il parut d’abord effrayé, et dans sa première surprise il attribua ce prodige à quelque pouvoir surnaturel. Mais, après avoir