Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 5.djvu/239

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avec une épée fort rouillée ; et nous étions tous si mal, qu’à peine avions-nous la force de nous remuer. Cependant cet avis nous ranima, et les plus abattus ne purent se résoudre à périr sans quelque défense. Nous prîmes dans nos mains des tisons ardens, avec lesquels nous courûmes au-devant de nos ennemis : les étincelles volaient de toutes parts, et rendaient le spectacle terrible. D’ailleurs les insulaires ne pouvaient être informés que nous étions sans armes ; aussi prirent-ils la fuite pour se retirer derrière un bois. Nos gens retournèrent auprès de leurs feux, où ils passèrent le reste de la nuit dans des alarmes continuelles. Rol et moi nous nous crûmes obligés, par prudence, de rentrer dans la chaloupe, pour nous assurer du moins cette ressource contre toutes sortes d’événemens.

» Le lendemain, au lever du soleil, trois insulaires sortirent du bois, et s’avancèrent vers le rivage. Nous leur envoyâmes trois de nos gens, qui, ayant déjà fait le voyage des Indes, connaissaient un peu les usages et la langue du pays. La première question à laquelle ils eurent à répondre, fut de quelle nation ils étaient. Après avoir satisfait à cette demande, et nous avoir représentés comme d’infortunés marchands, dont le vaisseau avait péri par le feu, ils demandèrent à leur tour si nous pouvions obtenir quelques rafraîchissemens par des échanges. Pendant cet entretien, les insulaires continuèrent de s’avancer vers la chaloupe, et