Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 5.djvu/306

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C’est ici le lieu de placer une aventure fort touchante arrivée au voyageur Carré, dont nous venons de tirer les détails qui regardent Surate. Il traversait les déserts de l’Arabie ; il s’était pourvu en Perse d’un guide arabe, nommé Hadgi-Hassem, dont on lui avait garanti le courage et la fidélité. Un jour que la disette d’eau, ou plutôt l’infection que les sauterelles avaient répandue dans tous les puits qui se trouvent sur la route, les avait réduits pour unique ressource à une petite provision d’eau fraîche qu’ils portaient dans des outres, ils aperçurent, à quatre cents pas d’une colline, un cavalier bien monté qui venait à eux à toute bride : ils s’arrêtèrent avec quelque défiance dans un lieu rempli de brigands : ils le couchèrent en joue, Carré armé de son fusil, et l’Arabe de son arc. Le cavalier retint son cheval, et leur cria en langue turque qu’il ne pensait point à les insulter. En leur tenant ce discours, il reculait sur ses traces pour se mettre hors de la portée du fusil qui lui était suspect. Lorsqu’il se crut en sûreté, il fit un signe de la main ; et, baissant la pointe de sa lance, il fit entendre aux étrangers qu’il désirait leur parler.

Hadgi-Hassem ne balança point à s’approcher de lui : Carré les laissa un moment ensemble. Après quelques mots d’explication, le cavalier, s’étant assuré qu’il n’avait rien à craindre, descendit de cheval, et la conversation devint commune ; mais les complimens ne fu-