Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 6.djvu/132

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neau. À la droite, une vieille femme noire tenait dans ses mains un petit mortier et un pilon d’or, où elle pilait des feuilles de bétel, parmi lesquelles elle mêlait des noix d’arek, avec de la semence de perles qu’on y avait fait dissoudre. Lorsqu’elle en voyait quelque partie bien préparée, elle frappait de la main sur le dos du roi qui ouvrait aussitôt la bouche, et qui recevait ce qu’elle y mettait avec le doigt comme on donne de la bouillie aux enfans. Il avait mâché tant de bétel et bu tant de tabac, qu’il avait perdu toutes ses dents.

Son palais ne faisait pas honneur à l’habileté de l’architecte. C’était un espace carré, ceint d’un grand nombre de petits piliers revêtus de différens vernis, et d’environ deux pieds de haut. Quatre piliers plus gros faisaient les quatre coins, à quarante pieds de distance. Le plancher était couvert d’une natte tissue de l’écorce d’un certain arbre dont aucune sorte de vermine n’approche jamais ; et le toit était de simples branches de cocotier. Assez proche, sous un autre toit, soutenu aussi par quatre gros piliers, on voyait seize éléphans. La garde royale, qui était d’environ deux mille hommes, était assise par bandes à l’ombre de quelques arbres. Tavernier ne prit pas une haute opinion du logement des femmes. La porte paraissait fort mauvaise, et l’enceinte n’était qu’une sorte de palissade entremêlée de terre et de fiente de vache. Deux