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tout le conseil, qui en compte les lignes et les ratures.

Dans les accusations graves, on a recours à la question pour suppléer au défaut des preuves communes ; elle est très-rigoureuse à Siam, et l’on y emploie plusieurs méthodes. Pour celle du feu, qui est la plus ordinaire, on allume un bûcher dans une fosse, de manière que la surface du bûcher soit de niveau avec les bords de la fosse. Sa longueur doit être de cinq brasses sur une de largeur. Les deux parties y passent nu-pieds d’un bout à l’autre ; et celui dont la plante des pieds résiste à l’ardeur du feu gagne son procès. Laloubère observe que, l’usage des Siamois étant d’aller nu-pieds, ils ont la plante si racornie, qu’avec assez de courage pour marcher ferme sur les charbons, il est assez ordinaire que le feu les épargne. Deux hommes marchent à côté de celui qui passe sur le feu, et s’appuient avec force sur ses épaules, pour l’empêcher de se dérober trop vite à cette épreuve ; mais il se peut que ce poids ne serve qu’à affaiblir l’action du feu sous les pieds.

Quelquefois la preuve du feu se fait avec de l’huile ou d’autres matières bouillantes, dans lesquelles les deux parties passent la main. Un Français qui se plaignait d’avoir été volé, sans en pouvoir donner des preuves, se laissa persuader de plonger sa main dans de l’étain fondu : il l’en tira presque consumée, tandis que le Siamois évita de se brûler, et fut