mais les hommes sont généralement paresseux, et ne penseraient qu’à satisfaire leur gourmandise, s’ils n’étaient forcés au travail.
C’est une autre erreur dans Tavernier de prétendre que les Tonquinois se font un déshonneur d’avoir la tête découverte : un inférieur ne paraît jamais que la tête nue devant son supérieur ; et ceux qui reçoivent quelque ordre du roi, verbal ou par écrit, ne peuvent l’entendre ou le lire sans avoir commencé par ôter leur robe et leur bonnet. À la vérité, les criminels qui sont condamnés à la mort ont la tête rasée, pour être reconnus facilement, s’ils échappaient à leurs gardes ; mais cette raison est fort différente de celle qu’apporte Tavernier ; il ne se trompe pas moins lorsqu’il parle des criminels écartelés ou crucifiés : ces supplices ne sont pas connus dans le pays.
La mémoire est, de toutes les facultés, la plus nécessaire pour l’espèce de science à laquelle ils aspirent ; elle consiste particulièrement dans un grand nombre de caractères hiéroglyphiques. De là vient que parmi leurs lettrés il s’en trouve qui n’ont pris leurs degrés qu’après quinze, vingt ou trente ans d’étude, et que plusieurs étudient toute leur vie sans pouvoir y parvenir ; aussi n’ont-ils pas de terme fixe pour le cours de leurs études : ils peuvent s’offrir à l’examen aussitôt qu’ils se croient capables de le soutenir. Le pays n’a pas d’écoles publiques. Chacun prend pour ses enfans le précepteur qui lui convient.