Page:La Landelle - Le Dernier des flibustiers, Haton, 1884.djvu/216

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et se mit à table, au frais, sur le bastion du Nord. Le tambour battit l’assemblée. Flèche-Perçante servit un excellent potage apporté par ses négrillons. La garnison était en rangs.

— Une assiette de soupe et un verre de vin du Cap, capitaine Venturel !… dit le chevalier.

— Pardon, commandant ; le service avant tout !

— Proclamez donc, mon cher !… proclamez !

— Au nom du roi ! dit Venturel avec découragement, il est ordonné à la garnison de Fort-Louis de ne plus reconnaître pour commandant le major Vincent du Sanglier, et de se ranger sous mes propres ordres.

Franche-Corde et ses camarades s’entre-regardèrent avec surprise.

— Allez donc, capitaine ! allez donc, mordious !… disait Vincent du Capricorne riant toujours. Ah !… vous avez une bien belle voix !

— Le commandant du Sanglier sera, sur-le-champ, arrêté et conduit à bord de la Consolante, continua Venturel d’un ton piteux.

Le chevalier, cette fois, ne fut plus le seul à rire ; la garnison entière éclata. Double ration ! rompez vos rangs ! marche !… dit le major. Aux éclats de rire succédaient les huées.

Sans avoir soupé, mais en compagnie de sa malle, Venturel se rembarqua pour la frégate, où il remit au baron le pli cacheté du major.

Luxeuil l’ouvrit en présence des deux commissaires du roi, et pâlit de fureur en n’y trouvant qu’un gant de peau de buffle avec cette inscription :

« Main droite du chevalier du Capricorne ! »

— M. Venturel, retournez à terre ! Je ne vous reçois pas à mon bord !… Je rendrai compte au ministre de votre incapacité !