— Mordious ! triple, s’il le faut, le nombre des danseuses. Pas de contr’ordres, jamais !
L’équipage de la Triomphante, commandée par le capitaine de frégate Kerléan, fut invité à être de la fête, qui commença vers deux heures après midi et qui devait finir avant le coucher du soleil, avec la retraite ; ainsi l’exigeait le commandant du Fort-Dauphin.
Toutes les beautés d’Anossi, parées de leurs mieux, étaient du complot :
— Quelles passes ! quels bonds ! quelles poses ! que de grâces, que de scélératesses !…
Les gens de garde, surveillés de près par le défiant Stéphanof, n’osaient déserter leur poste ; mais on ne put les empêcher d’y recevoir de nombreuses visites. Les aimables insulaires qui donnaient le bal, s’étaient transformées en autant de cantinières ; elles offraient des rafraîchissements que matelots ou soldats recevaient avec un égal entrain.
Peu à peu la place d’armes se remplit de brunes perfides.
Il n’y avait presque point de guerriers indigènes avec elles ; – cependant, Stéphanof s’avisa tout à coup de concevoir des soupçons, le jour baissait ; il donna l’ordre de battre la retraite, de renvoyer les étrangères qui avaient envahi le fort et de s’apprêter à fermer les portes.
Pas un tambour ne se montra. On chercha leurs caisses, elles furent introuvables.
— Aux armes ! cria Stéphanof.
La garde avinée chantait des chansons de cabaret.
Stéphanof courut au poste ; tous les fusils, à l’exception de celui du factionnaire, avaient été escamotés. Une bruyante farandole, conduite par une princesse inconnue, s’avançait vers la porte royale.