Page:La Madelène - Le comte Gaston de Raousset-Boulbon, sa vie et ses aventures, 1859.djvu/41

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s’était pris jour sa nouvelle patrie et aussi avec quel remarquable coup-d’œil il jugeait de ce qui était à faire.

Gaston de Raousset revendique avec énergie les droits de la population civile :

« Personne plus que nous, dit-il, ne rend hommage aux services de l’armée d’Afrique ; mais si la tâche du soldat est belle, la nôtre a son prix.

» La force qui détruit est dans l’armée ; la force qui produit et qui fonde est en nous.

» La France a jeté un milliard en Algérie ; grâce à une population civile assez énergique pour n’avoir pas fui les aventures, il y a aujourd’hui près de huit cent millions de capitaux immobilisés en Algérie.

» Ce chiffre a son éloquence.

» La société européenne de l’Algérie fût-elle uniquement composée des cantiniers de l’armée, comme le disent les uns ; se fût-elle formée, comme le disent les autres, du rebut de l’Europe et de l’écume de la Méditerranée, cette population compte aujourd’hui cent dix mille âmes. Elle travaille, elle possède ; ce n’est pas une plèbe, c’est une société intéressée à l’ordre et mûre pour le règne de la loi. »

Cette brochure est le premier écrit politique de Gaston de Raousset ; elle est remarquable par sa fermeté, son éloquence et son côté pratique. Elle fit à son apparition la sensation la plus grande.

« Qu’on nous dise, nous le demandons hardiment, quels sont les capitalistes qui consentiront à vivre dans un pays où les intérêts sont confiés à une administration que les administrés n’ont pas le droit de contrôler ?

» L’homme qui, dans son département, peut être conseiller municipal, conseiller général, électeur, député, renoncera-t-il volontiers aux avantages, à l’influence, à la considération qui se rattachent à une telle