Page:La Mettrie - Œuvres philosophiques, éd. de Berlin, Tome premier, 1796.djvu/55

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Préliminaire. 59

au-defTus des préjugés, je gémis fur leur nécefiité , fAché que le monde entier ne puiiTe être peuplé d’habitants qui fe conduifent par raifon. Voila mon ame toute nue. Pour avoir dit librement ce que je penle , il ne faut donc pas croire que je fois ennemi des bonnes mœurs , ni que j’en aie de mauvaifes. Si impuni ejî pagina inihl , vita proha. Je ne fuis pas plus Spinofifte , pour avoir fait r homme machine , & expofé le fyftéme dEpiciire , que méchant , pour avoir fait une fatyre contre les plus cliarlàtanrs de mes confrères ; que vain , pour avoir critiqué nos beaux efprits ; que débauché , pour avoiir ofé manier le délicat pinceau de la volupté. Enfin j quoique j’aie fait main baffe fur les remords ^ çomaie philofophe , h ma doctrine étoit dangereufe ( ce que je défie le plus acharne de mes ennemis de prouver ) j’en aurois moi - même comme citoyen.

J’ai bien voulu au refle avoir une pleine condefcendance pour tous cqs efprits foi blés, bornés, fcrupuleux , qui compofent le Jàvant public ; plus ils m’ont mal compris & mal interprété , plus ils ont repréfenté pnon dtffein avec une injuftice odieufe , moins j’ai cru devoir leur remettre devant les yeux un ouvrage qui les a fi fort & fi mal-à-propos fcandalifés , feduits fans doute par ces efpcces d’abattis philofophiques que j’ai faits C4