Page:La Mettrie - L'homme machine, 1748.djvu/64

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traces, par lesquelles nous distinguons & nous nous rapellons les objets. Toutes nos idées se réveillent, comme un Jardinier qui connoîe les Plantes, se souvient de toutes leurs phrases à leur aspect. Ces Mots & ces Figures qui sont désignées par eux, sont tellement liés ensemble dans le cerveau, qu'il est assez rare qu'on imagine une chose, sans le nom, ou le Signe qui lui est attaché.

Je me sers toujours du mot imaginer, parce que je crois que tout s'imagine, & que toutes les parties de l'Ame peuvent être justement réduites à la seule imagination, qui les forme toutes; & qu'ainsi le jugement, le raisonnement, la mémoire ne sont que des parties de l'Ame nullement absolües, mais de véritables modifications de cette espèce de toile médullaire, sur laquelle les objets peints dans l'œil, sont renvoiés, comme d'une Lanterne magique.

Mais si tel est ce merveilleux & incompréhensible résultat de l'Organisation du Cerveau; si tout se conçoit par l'imagination, si tout s'explique par elle; pourquoi diviser le