Page:La Mettrie - L'homme machine, 1748.djvu/91

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il donc assez grand Géometre, pour varier ainsi à son gré les ouvrages dont on le suppose Auteur, sans que tant de diversité pût l'empêcher d'atteindre le même fin. Il objecte encore ces parties evidemment contenües dans l'Animal pour de futurs usages; le Papillon dans la Chenille; l'Homme dans le Ver spermatique; un Polype entier dans chacune de ses parties; la valvule du trou ovale, le Poumon dans le fetus; les dens dans leurs Alvéoles; les os dans les fluides, qui s'en détachent & se durcissent d'une manière incompréhensible. Et comme les Partisans de ce système, loin de rien négliger pour le faire valoir, ne se lassent jamais d'accumuler preuves sur preuves, ils veulent profiter de tout, & de la foiblesse même de l'Esprit en certains cas. Voiez, disent-ils, les Spinosa, les Vanini, les Desbarreaux, les Boindin, Apôtres qui font plus d'honneur, que de tort au Déïsme! La durée de la santé de ces derniers a été la mesure de leur incrédulité: & il est rare en effet, ajoutent-ils, qu'on n'abjure pas l'Athéïsme, dès que les passions se sont affoiblies avec le corps qui en est l'instrument.

Voilà certainement tout ce qu'on peut dire de plus favorable à l'existence d'un Dieu, quoique le dernier argument soit frivole, en ce que ces conversions sont courtes, l'Esprit reprenant presque toujours ses anciennes opinions, & se conduisant en conséquence, dès qu'il a recouvré, ou plutôt retrouvé ses forces dans celles du corps. En voilà du moins beaucoup plus que n'en dit le Medecin Diderot, dans ses Pensées Philosophiques, sublime ouvrage