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LA NATURE.

grande admiration et la plus sincère attachement pour son ancien professeur. Agassiz épousa la fille d’un botaniste suisse que le roi de Prusse attira à Berlin. Agassiz ne voulut point imiter son beau-père, et il resta au milieu de la Suisse romande, dont il aimait avec passion les admirables paysages. Mais M. de Humboldt, qui était le miuislre des libéralités du roi de Prusse, et qui avait un crédit illimité chez le banquier de la cour, avança à Agassiz les fonds nécessaires pour la publication de son grand ouvrage sur les Poissons fossiles. Sans doute, en reconnaissance de ce bienfait, Agassiz donna à son fils aîné le nom d’Alexandre.

Agassiz, à l’âge de 40 ans.

Sur ces entrefaites, un des compatriotes d’Agassiz, nommé Charpentier, découvrit dans les montagnes les roches striées et les traces de l’action d’anciens glaciers éteints. Agassiz devina toute l’importance d’une remarque aussi intéressante, et il entreprit avec toute la fougue, de la jeunesse de grandes expériences pour démontrer qu’à une certaine époque, les glaciers de la Suisse débordaient sur toutes les régions voisines. Agassiz ne perdit point courage. Il enseigna hardiment l’existence d’une période glaciaire, étonnant épisode de l’évolution mystérieuse de notre globe. Cette révélation inattendue jeta le trouble dans toutes les académies des deux mondes. Pendant quelque temps elle n’excita que des sourires de pitié sur les lèvres des savants patentés. Mais Agassiz n’était point homme à se laisser arrêter dans sa route. Sa voix éloquente et sa conviction profonde lui conquirent des disciples. Aussitôt les glaciers, jusqu’alors délaissés, se peuplent de chercheurs qui, presque tous, sont devenus illustres. Leur livre d’or, c’est la pierre où chacun d’eux a écrit son nom ; on l’a nommée l’Hôtel des Neuchâtclois, parce qu’Agassiz et ses amis campaient sous son ombre pendant qu’ils procédaient à leurs grandes expériences.

À cette époque, la pierre était inclinée et soutenue par deux murs de pierres sèches. Comme elle s’était délitée et redressée en marchant vers la moraine frontale, on renonça à s’en servir comme d’un abri. C’est alors que M. Dollfus-Ausset, le frère du maire de Mulhouse, fit construire la cabane en terre ferme qui domine le glacier de l’Aar, et où les voyageurs vont encore se reposer.

Nous avons reproduit l’Hôtel des Neuchâtelois