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Page:La Nature, 1873.djvu/175

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LA NATURE.

les indications thermométriques on trouva que les deux années ont été aussi chaudes l’une que l’autre, mais l’une a été humide, le ciel était couvert, tandis qu’en 1865 le soleil était éclatant.

L’importance de la lumière, dans les phénomènes de la végétation, n’avait pas au reste échappé à un des esprits les plus distingués de ce siècle, A. de Humboldt, qui, dans le Cosmos écrivait, il y a déjà longtemps : « Si là où les myrtes croissent en pleine terre (Salcombe, sur les côtes de Devonshire ; Cherbourg, sur celles de Normandie), et où le sol ne se couvre jamais en hiver, d’une neige persistante, les températures d’été et d’automne suffisent à peine pour porter les pommes à maturité ; si la vigne, pour donner un vin potable, fuit les îles et presque toutes les côtes, même les côtes occidentales, ce n’est pas seulement à cause de la température qui règne en été sur le littoral ; la raison de ces phénomènes est ailleurs que dans les indications fournies par nos thermomètres, lorsqu’ils sont suspendus à l’ombre. Il faut la chercher dans l’influence, de la lumière directe, dont on n’a guère tenu compte jusqu’ici, bien qu’elle se manifeste dans une foule de phénomènes. Il existe, à cet égard, une différence capitale entre, la lumière qui a traversé un ciel serein et celle qui a été affaiblie et dispersée en tout sens par un ciel nébuleux. »

Nous avons vu dans les pages précédentes que la quantité d’eau, évaporée par les feuilles, était considérable ; essayons d’en déduire l’évaporation d’une surface cultivée, nous pourrons en tirer peut-être quelques conclusions importantes sur les quantités d’eau qu’elle devra recevoir pour que les plantes y prospèrent.

Nous avons trouvé à Grignon, où ont été faites toutes les expériences citées dans cet article, que dans un champ de maïs médiocrement garni, on comptait 30 pieds par mètre carré ; le poids des feuilles, le 9 juillet, était environ de 242 gr. par mètre carré. Ces feuilles, par une journée claire, donnaient au minimum 150 pour 100 d’eau en une heure, ou en dix heures 1 500 d’eau pour 100 de feuilles. Les 242 grammes de feuilles devaient donc donner 3 630 grammes d’eau.

Ainsi, en une journée de dix heures, un mètre carré jetait dans l’air plus de trois kilogrammes d’eau, un hectare en donnait donc 30 tonnes ; ce chiffre peut paraître énorme, il n’est pas très-éloigné cependant de celui qui a été calculé, il y a plus d’un siècle, par le célèbre naturaliste anglais Hales, qui estimait qu’un hectare planté en choux, émettrait, en une journée, 20 mètres cubes d’eau ; enfin, le botaniste Schleiden a déterminé, au moyen de pesées directes, la quantité d’eau évaporée par un mélange d’avoine et de trèfle, semé dans une caisse de tôle remplie de terre. Il l’avait trouvé égale à 3 284 000 kil. par hectare, du 12 avril au 19 août. En comptant 129 jours pour cette période, on trouve 25 tonnes par jour, nombre peu différent de celui que nous avons donné plus haut.

Ces quantités sont celles que consomme la culture ordinaire, mais si nous passons à la culture maraîchère infiniment plus intensive que celles dont il vient d’être question, nous trouvons, pour les quantités d’eau d’arrosage, des nombres infiniment plus élevés ; on estime que les maraîchers de Paris versent par an, sur leurs terrains richement fumés, une hauteur d’eau de 4 mètres ; en admettant que la culture dure 250 jours, car en hiver elle est presque arrêtée, on trouve que l’hectare reçoit journellement 160 mètres cubes d’eau ; on sait combien sont productives les cultures ainsi largement approvisionnées d’eau et d’engrais, elles élèvent le rendement brut de l’hectare à 2 000 ou 3 000 fr., au lieu de la laisser, comme la grande culture à 500 ou 600 fr.

P.-P. Dehérain.

TRAVERSÉE DE L’ATLANTIQUE
EN BALLON.

M. John Wise est un aéronaute américain bien connu de l’autre côté de l’Atlantique. Il s’est rendu célèbre aux États-Unis par quelques belles excursions aériennes et notamment par un grand voyage exécuté en juillet 1859, de Saint-Louis au comté de Jefferson. Depuis que M. Wise a exécuté cette longue traversée atmosphérique de 1 150 milles, il n’a qu’une ambition, c’est de mettre en action, l’histoire légendaire d’Edgar Poe, c’est de réaliser l’étonnante traversée de l’océan Atlantique par voie aérienne ! Il n’était pas facile, on le conçoit, de trouver des bailleurs de fonds, pour prêter le concours de l’argent, à une semblable témérité. M. John Wise en véritable Yankee, ne s’est pas découragé devant les obstacles. Après avoir frappé à d’innombrables portes, toujours restées closes, il a vu s’ouvrir enfin celle du Daily Graphic, journal américain, dont le directeur se propose de faire tous les frais de l’entreprise. Le propriétaire du Daily Graphic fait construire un ballon gigantesque sur les plans de l’aéronaute. Mais celui-ci s’engage à ne faire aucune exhibition, à n’entreprendre aucune ascension sans le consentement de celui qui lui donne le moyen de réaliser son projet. L’ascension sera publique et il est possible que l’immense concours de monde, attiré par un spectacle exceptionnel, permette au Daily Graphic de rentrer dans ses dépenses, et de réaliser même, dans le cas de succès, un bénéfice assez important.

L’aérostat que M. John Wise, construit actuellement à New-York sera le plus grand de tous les ballons connus jusqu’à ce jour. Son volume, de 20 000 mètres cubes environ, dépassera celui de l’aérostat captif de Londres, construit par M. H. Giffard ; il surpassera ce dernier ballon de 3 mètres environ en diamètre. Pour que l’on puisse se rendre compte exactement de la dimension comparative des différents aérostats, nous en représentons ci-contre trois modèles, dessinés à la même échelle. Le plus petit aérostat, de notre figure, cube 650 mètres ; son dia-