Page:La Nature, 1877, S1.djvu/8

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Centre, moins dévastée dans le Midi où l’on rencontre encore çà et là un certain nombre de types échappés à la destruction, réfugiés sur quelques points et attestant par leur persistance le souvenir d’un état de choses depuis longtemps change, mais dont ils furent pourtant les témoins.

Chacune des cinq périodes que je viens de signaler, malgré le peu de précision de leurs limites respectives, revêt pourtant une physionomie saisissable et se rattache à une configuration spéciale du sol européen, souvent très-différente de ce qu’elle était dans la période antérieure ou suivante et souvent aussi bien éloignée de ce qu’elle est maintenant sous nos yeux. Mais il convient d’ajouter pourtant que l’ensemble des terrains tertiaires répond à une si longue durée, qu’il serait inexact de croire que la distribution des terres et des mers soit demeurée stable dans l’intérieur de chaque période ; le contraire est vrai, du moins pour quelques-unes d’entre elles, et pendant l’éocène, comme pendant le miocène et le pliocène, les mers ont changé de lit et d’assiette à diverses reprises, ou même les nappes lacustres ont été remplacées par des bassins marins et réciproquement, sur les mêmes lieux, sans que ces variations, immenses lorsqu’on les considère en elles-mêmes, aient entraîné dans la végétation contemporaine aucune perturbation assez sensible pour justifier l’établissement d’une période à part, correspondant au temps précis où elles s’accomplirent. C’est ainsi que dans le cours du miocène, la Suisse fut d’abord couverte de lacs (étage aquitanien), puis envahie par la mer de la mollasse (étage molassique ou helvétien), dont le retrait partiel donna plus tard lieu à l’établissement de nouvelles nappes lacustres (étage œningien).

Malgré ces vicissitudes, dont le midi de la France reproduit également le tableau, la végétation miocène conserva assez d’unité et les traits caractéristiques de sa physionomie sont assez persistants, assez uniformes d’un bout à l’autre de la période, pour qu’il n’y ait ni avantage ni motif sérieux à vouloir la scinder ; il est probable en effet que malgré ces alternatives d’envahissement et de retrait des eaux les conditions régulatrices du climat européen restèrent à peu près les mêmes, sauf une légère diminution de la chaleur primitive. Celle-ci tendit constamment à s’abaisser par l’effet du temps écoulé et par suite d’un phénomène d’un ordre, à ce qu’il semble, purement cosmique et dont la vraie cause n’a pu être saisie jusqu’à présent. Mais les réflexions seraient interminables et la pensée s’égarerait à la poursuite d’une multitude de détails, si je ne me bâtais de rentrer au cœur du sujet et de revenir aux lignes principales, en reprenant une à une les cinq périodes dont j’ai parlé. J’essayerai donc de les passer en revue et d’en tracer au moins une légère esquisse. Cte  G. de Saporta
Correspondant de l’Institut.

La suite prochainement. —