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Chez les Rhipidodendron (fig. 3, n° 1), l’Infusoire habite un tube plus ou moins courbe, épais, granuleux, peu transparent, dont la longueur croît constamment et qui s’allonge si bien que son propriétaire n’habite qu’une partie insignifiante de sa longueur. Plusieurs de ces tubes s’accolent l’un à l’autre de manière à former les touffes les plus gracieuses. Les Cladomonas (fig. 4, n°2) construisent des tubes analogues, mais disposés en ramifications dichotomiques. L’habitation prend une importance plus grande encore chez les Phalansterium (fig. 4, n°3) que l’on trouve logés au sommet de grandes massues gélatineuses, hantées les unes sur les autres et se disposant en arborescences plus ou moins compactes.

Fig. 1. — INFUSOIRES FLAGELLIFÈRES. — 1. Astasia hæmatodes, Ehrb. — 2. Phacus longicauda, Ehrb. — 3. Euglena deses, Ehrb. — INFUSOIRES CILIÉS. — 4. Stentor polymorphus, Ehrb.

Ainsi non seulement les Infusoires flagellifères sont aptes à vivre en commun, à se grouper en colonies, mais encore ils peuvent, sans rien perdre de leur caractère primitif, compliquer ces colonies de parties accessoires volumineuses, vivantes en apparence et qui ne sont guère cependant que le résultat d’une sorte d’exsudation de l’Infusoire. On passe graduellement de formes simples comme les Euglènes ou les Salpingœca à de véritables cités d’Infusoires, cités bâties en commun, où chaque individu conserve son indépendance au même degré que peuvent le faire les citoyens d’une ville les uns par rapport aux autres. De même aussi que dans une ville les maisons et les édifices sont infiniment plus volumineux que les habitants, nous voyons dans ces colonies d’Infusoires flagellifères l’habitation former une masse infiniment plus considérable que la masse totale des êtres actifs à qui elle doit son origine. Ce renversement du rapport de grandeur entre l’essentiel et l’accessoire a une importance qui mérite d’être signalée ; nous le retrouverons dans d’autres cas où il aurait pu devenir embarrassant si sa possibilité n’était pas nettement démontrée par les faits que nous venons d’exposer.

Fig. 2. — INFUSOIRES FLAGELLIFÈRES. — 1. Codosiga Botrytis, Ehrb. Les deux individus de gauche montrent sur le côté leur vésicule contractile gonflée. — 2. Salpingæca Clarkii, Bütschli. — 3. Dinobryon sertularia, Ehrb. — 4. Uvella virescent, Ehrb.

Il arrive quelquefois que les individus composant ces colonies se détachent et vont fonder des colonies ailleurs. Il suffit d’observer quelque temps un Rhipidodendron pour voir ce phénomène se produire. Aussi toute colonie contient-elle un assez grand nombre de tubes abandonnés par leur hôte ; mais quand tous les Infusoires sont encore là, une merveilleuse activité règne dans ce petit monde. L’eau ambiante, constamment fouettée par les flagellum vibratiles, circule rapidement autour de lui, apportant sans cesse l’air nécessaire à la respiration et les matières alimentaires que chaque Infusoire saisit au passage.

Les colonies d’Anthophysa, de Codosiga, d’Uvella, de Dinobryon, etc., sont évidemment formées d’élé-