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Page:La Nouvelle revue, troisième série, tome 05, 1908.djvu/486

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LES HYMNES À LA NUIT

toutes choses, la Fantaisie. Âpre, une bise glaciale courut sur les plaines inertes, et l’Éden inerte s’anéantit dans l’éther. Les lointains infinis du ciel se peuplèrent de mondes lumineux. Au profond du Sanctuaire, en la région de l’être, l’Âme de l’Univers pénétra avec ses puissances, pour y gouverner jusqu’au lever du Jour Nouveau, jusqu’à l’aurore de la suprême Magnificence du Monde. La Lumière cessa d’être le séjour des Divinités et un signe céleste, et la Nuit fut le voile dont s’enveloppèrent les Dieux. La Nuit devint la génitrice féconde des Révélations.

Parmi les hommes, au milieu de ce peuple par chacun méprisé, mûr trop tôt et, plein de morgue, trop tôt devenu étranger à l’innocence heureuse de la jeunesse, là, dans la merveilleuse hutte de la Pauvreté, apparut, avec un visage jamais vu jusqu’alors, le Monde Nouveau : Fils de la première entre toutes les Vierges et entre toutes les Mères, Fruit infini d’un mystérieux embrassement. La sagesse intuitive et fleurie de l’Orient fut la première à reconnaître l’aube des temps nouveaux : une étoile lui montra le chemin de l’humble berceau du Roi. Au nom de l’Avenir lointain, les mages l’honorèrent par l’éclat et le parfum, miracle suprême de la nature. Seul s’épanouit le Cœur céleste en giron ardent de l’Amour, tourné vers la face auguste du Père et reposant contre le sein béat de pressentiment de la Mère adorablement grave. L’œil prophétique de l’enfant florissant fixait, avec une ardeur divinisante, les jours du Futur, insoucieux du sort de sa terrestre existence et regardant ses bien-aimés, rejetons de sa race divine. Étrangement subjuguées par un amour puissant, à son entour bientôt les âmes les plus innocentes s’assemblèrent. Une vie nouvelle, étrangère, ainsi que fleurs germa à ses côtés. D’intarissables paroles et les messages les plus joyeux tombaient de ses lèvres aimables comme des étincelles d’un esprit divin. Des lointains rivages, né sous le ciel serein d’Hellas, un Chanteur s’en vint en Palestine, qui fit don de tout son cœur à l’Enfant Miraculeux :

« Tu es cet Adolescent qui, depuis des temps, se dresse en profonde méditation sur nos tombeaux, signe consolateur en la ténèbre, commencement joyeux de l’humanité supérieure. Ce qui jusqu’ici nous plongea dans une insondable détresse, à soi maintenant nous attire, éveillant en nous une douce aspiration. En la Mort s’est révélée la Vie éternelle, tu es cette Mort et toi seul nous as sauvés ! »

L’âme remplie de joie, le Chanteur s’en alla vers l’Indoustan, le cœur comblé d’éternel amour, que, sous ce doux ciel uni si