Page:La Plume (Revue) - Volume 14, 1902.djvu/378

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


La Nasarde


D’un seul bond ! enfourchant la nuque du Satyre,
La nymphe rit, s’assied, cambre ses lestes reins,
Frotte son petit ventre au col couvert de crins
Et, les pieds en avant, toute souple, s’étire.

Pan surpris fait un pas. Il chancelle. Assourdi,
Aveuglé dans l’étau des cuisses frémissantes,
L’horrible dieu chéri par les adolescentes
Voûte son large dos musculeux et grandi.

Il la porte. Elle rit, danse du bout des hanches,
S’accoude au crâne hirsute, effeuille au vol les branches,
Penche à l’ombre son front couronné de soleil,

Risque un œil par-dessus les deux cornes, se montre,
Et son pied familier nargue d’un coup d’orteil
Le monstre du désir qui monte à sa rencontre.


Pierre Louÿs.