Page:La Retraite de Laguna (Plon 1891).djvu/205

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soldats ; mais la privation de chaussures était, par l’habitude, beaucoup moins sensible à ceux-ci qu’aux premiers, dont les pieds étaient tout gonflés et saignants.

Cette nuit-là, un vent du nord nous glaça, exposés que nous fûmes en même temps à une de ces rosées qui nous avaient déjà tant fait souffrir, alors que nous pouvions nous en défendre sous quelques tissus de laine.

Tous furent sur pied de bonne heure comme à l’ordinaire ; mais notre guide, continuant à se montrer irrésolu, appelait son fils à des colloques fréquents ; paraissant même vouloir abandonner dans la marche la direction de l’est, il insinuait qu’il ne l’avait suivie jusqu’alors que pour contourner un marais. Enfin, tout d’un coup, il prit au nord-est. Les Paraguéens, selon ce que nous pûmes conjecturer, furent déconcertés par cette déviation subite. Plusieurs d’entre eux gravirent au galop la colline où leur commandant devait se trouver.

Nous ne tardâmes pas, du reste, à savoir que nous étions enfin rentrés dans la véritable route : à un quart de lieue plus loin, nous arrivions sur la rive gauche d’un gros cours d’eau