Page:La Revue blanche, t29, 1902.djvu/377

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tes les parties nécessaires à la stabilité de cette position d’équilibre. Voici d’ailleurs d’autres exemples du développement des organes par l’habitude (p. 249) :

« L’oiseau que le besoin attire sur l’eau pour y trouver la proie qui le fait vivre, écarte les doigts de ses pieds lorsqu’il veut frapper l’eau et se mouvoir à sa surface. La peau qui unit ces doigts à leur base, contracte, par ces écartements des doigts sans cesse répétés, l’habitude de s’étendre ; ainsi, avec le temps, les larges membranes qui unissent les doigts des canards, des oies, etc., se sont formées telles que nous les voyons. Les mêmes efforts faits pour nager, c’est-à-dire, pour pousser l’eau, afin d’avancer et de se mouvoir dans ce liquide, ont étendu de même le$ membranes qui sont entre les doigts des grenouilles, des tortues de mer, de la loutre, du castor, etc… »

Ainsi donc, des circonstances analogues (dans l’espèce, la vie aquatique) peuvent développer chez des êtres différents des caractères de similitude ; les pattes palmées n’indiquent pas une parenté entre la grenouille et le castor ; ce sont des caractères de convergence, résultant d’adaptation aux même conditions de vie.

Lamarck a bien compris la difficulté qui résulte de ce fait pour l’établissement de la classification naturelle. Nous retrouvons d’autres caractères de convergence dans les exemples suivants qui mettent en relief l’atrophie d’un organe par la désuétude (p. 241) :

« Des yeux à la tête sont le propre d’un grand nombre d’animaux divers, et font essentiellement partie du plan d’organisation des vertébrés.-

« Déjà néanmoins la taupe, qui, par ses habitudes, fait très peu d’usage de la vue, n’a que des yeux très petits, et à peine apparents, parce qu’elle exerce très peu cet organe.

« L’aspalax d’Olivier (Voyage en Egypte et en Perse, II, pl. 28, f. 2), qui vit sous terre comme la taupe, et qui vraisemblablement s’expose encore moins qu’elle à la lumière du jour, a totalement perdu l’usage de la vue : aussi n’offre-t-il plus que des vestiges de l’organe qui en est le siège ; et encore ces vestiges sont tout à fait cachés sous la peau et sous quelques autres parties qui les recouvrent, et ne laissent plus le moindre accès à la lumière.

« Le protée, reptile aquatique voisin des salamandres par ses rapports et qui habite dans des cavités profondes et obscures qui sont sous les eaux, n’a plus, comme l’aspalax, que des vestiges de l’organe de la vue ; vestiges qui sont couverts et cachés de la même manière, »

Ici encore, la cécité est un caractère de convergence n’établissant aucune parenté entre le protée et l’aspalax.

De toutes ces considérations Lamarck tire sa conclusion particulière qu’il oppose comme il suit à la conclusion admise jusqu’à lui (p. 265) :