Page:La Revue blanche, Belgique, tome 3, 1891.djvu/55

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
193

que la première n’est que la seconde vue d’une autre face ; mais encore a-t-on la liberté de regarder l’endroit, ou l’envers. Précisément tous les livres de prose, ou presque, que le hasard des dates de publication, accumule ce même mois sur ma table sont, comme l’un d’eux se sousintitule, des « romans de la vie cérébrale ». (Oui, psychologues est trop spécial pour s’appliquer à des mystiques, à des idéologues, à des sensitifs. On dirait mieux les intérieurs. Mais il n’importe.)

Ils sont assez nombreux et assez notoires, ces livres étrangers à l’esthétique d’ailleurs honorable des naturalistes, pour que je doive prier qu’on me permette l’ajournement à un mois des réflexions suggérées par le Mal Moderne de M. Antoiny Blondel, la Force des Choses, de M. Margueritte, le Nazaréen de M. H. Mazel. — On m’excusera aussi de ne pas paraphraser l’Exorcisée de M. Hervien : je laisse ce soin à Madame Madeleine Lemaire, et, en son absence, à sa fille, les aquarelles de ces dames convenant mieux que ma stricte prose aux marginalia du spirituel romancier. — Non plus ne découragerai-je M. Léon Daudet pour son Germe et Poussière ; et pourtant le vieil ami de son père, l’excellent Philippe Gille a raison : il n’y a plus d’enfants ! — Nous avons aussi M. Marcel Prévost, notre sympathique confrère du Roman romanesque : un voisin ! Nous voisinerons, quand il aura achevé le plan de sa petite campagne pour le prochain hiver… Mais des choses sérieuses nous requièrent.

Voici l’Ornement des Noces spirituelles, de Ruysbroeck l’Admirable, traduit du flamand et précédé d’une introduction par Maurice Mæterlinck[1], et voici l’occasion qui ne me fut pas encore donnée ici de parler de Mæterlinck. Il n’était pas besoin de la traduction de Ruysbroeck pour savoir que M. Mæterlinck est le plus intérieur des intérieurs. C’est le vrai mystique, le seul mystique d’aujourd’hui. Ses premiers essais, Serres chaudes, n’étaient que d’un baudelai-

  1. Bruxelles, Lacombles éditeur.