Page:La Revue blanche, t12, 1897.djvu/276

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tion socialiste révolutionnaire concentrée à la Corderie, siège du comité des vingt arrondissements, qui, au cri de Vive la Commune ! avaient assailli l’Hôtel de Ville le 8 octobre, y avaient pénétré le 31 octobre ; et le 22 janvier avaient tenté pour la défense de la République et pour la révolution, de s’emparer du pouvoir, ceux-là n’étaient pas dans l’incertitude. Ils avaient vu, pendant toute la durée du siège, le mouvement révolutionnaire grandir, sans cependant entraîner la population dupée par les mensonges et le charlatanisme de ses gouvernants ; et ils pouvaient prévoir la colère populaire et la révolte au jour de la désillusion et de la trahison avérée. C’est ce qui arriva, quand après avoir répondu à notre affiche rouge, qu’il ne capitulerait pas le gouvernement capitula et, en haine de la Révolution, livra Paris et le pays à l’envahisseur monarchique, devenu son allié contre-révolutionnaire.

Les événements avaient dispersé le comité de la Corderie et les comités des arrondissements ; leurs membres les plus actifs avaient eu le tort de se rendre en province, si bien qu’ils n’eurent pas la direction du mouvement tumultueusement croissant qui suivit la trahison gouvernementale et où tous les courants de l’opinion irritée et révoltée enfin, venaient se mêler.

Le comité central de la garde nationale fut l’expression de cette période incertaine et intermédiaire, d’où par l’élection du 26 mars sortit la Commune élue.

Dans la Commune élue entraient plusieurs des révolutionnaires de la Corderie et des révolutionnaires et socialistes de divers groupements ; aussi cette élection redonna une impulsion, une direction plus socialiste. La Commune élue était loin cependant de valoir ce qu’eût été le comité de la Corderie, la Commune révolutionnaire, maîtresse du pouvoir ; elle n’en avait ni l’unité de pensée et d’action, ni l’énergie. C’était une assemblée délibérante sans cohérence suffisante et où l’esprit de décision n’était pas au niveau de la bonne volonté et des intentions. Ce qu’on peut dire à son éloge c’est qu’elle était bien la représentation et la représentation socialiste de Paris révolté et qu’elle fit de son mieux pour le représenter et le défendre.

L’on peut ajouter aussi : que dans leurs fonctions, la plupart des citoyens, qui y avaient été délégués, firent honneur à leur mandat ; et c’est moins à eux qu’il faut en faire honneur qu’au milieu révolutionnaire et enthousiaste qui élevait, grandissait tout et avait fait, en ces quelques inoubliables et admirables semaines, du peuple de Paris en armes, d’abord pour la garde de ses armes, et contre la réaction et les provocations de Versailles, puis de plus en plus pour l’émancipation ouvrière et la Révolution, un peuple de combattants et de citoyens.

À mesure, en effet, que la menace de la défaite devenait plus pressante, l’esprit de la révolution animait davantage ceux qui restaient debout, qui vivaient, qui luttaient. Ils représentaient vraiment Paris et son peuple. Et c’est leur lutte et leur mort qui a fait aux