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Les armées de la Commune comptaient peu d’hommes connaissant ce qui s’appelle le métier de la guerre, mais tous étaient également braves. Cluseret, La Cecilia, Dombrowski, Rossel
Dessin de Walter Crâne
étaient presque les seuls généraux venant de l’armée, mais l’enthousiasme, le mépris de la mort ont une grande valeur, quand le nombre des combattants est relativement petit, il fut quelquefois si restreint, à Ivry, à Clamart, à Neuilly que ce fut une chance extraordinaire que l’ennemi ne s’en doutât pas. — C’est avec cette sorte de combattants qu’il eût fallu enlever la situation dès les premiers instants ; — déjà perdue, la ruche fédérée arrête pendant huit jours la plus formidable armée qu’ait déployée la troisième république.

Ce n’était pas l’heure du parlementarisme et la Commune n’eut jamais à se louer des séances où elle en fit, quoiqu’elle comptât des hommes éloquents, tels que le vieux Pyat, Vallès et tant d’autres. Majorité et minorité se trouvèrent réunies, à l’heure suprême, dans une même grandeur de sacrifice.

Vous me demandez, chers camarades, quel a été mon rôle du 18 mars à la fin de mai 1871. Je suis partie avec les compagnies de marche de la Commune, dès la première sortie ; je faisais partie du bataillon de Montmartre et je me suis battue dans les rangs comme un soldat, j’ai pensé qu’en conscience c’était ce qu’il y avait de plus utile à faire — j’ai nécessairement continué dans Paris comme les autres, jusqu’à ce que les Versaillais ayant arrêté ma mère pour la fusiller à ma place, je sois allée la faire mettre en liberté (malgré elle) en réclamant cette place pour moi.

J’ai raconté bien des fois comment pendant le voyage de Calédonie je suis devenue anarchiste, et il me semblait les événements de cette époque loin de nous comme de mille années, quand on s’est remis à parler de la Commune et à nous interroger, nous qui sommes pareils à des ombres, ayant passé à travers tant de morts ; l’heure serait-elle venue où le spectre de mai se lèvera ?

Londres.