Page:La Revue blanche, t21, 1900.djvu/73

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tés, mais qu’ont vulgarisés les reproductions (la femme au cochon, la Buveuse d'absinthe, la Prostitution et le Vol, etc.), l’intérêt sera plutôt dans la comparaison facilitée avec Louis Legrand.

Les femelles ropsiaques ne sont pas plus la divine femme antique (Incessu patuit Dea !) que la fillette vicieuse de Paris. « gazouillant troupeau de beauté d’hôpital ». mais la grasse, opulente, un peu lourde fille des Flandres : une Junon de Rubens retroussant sa tunique. Une beauté majestueusement mafflue, s’initiant à la dynamique érotique des petites mécaniques parisiennes ; inculquant, brave bête amoureuse créée pour procréer, à sa splendide sensualité animale le vice frétillant, avec la psychologie complexe et futile de commerçantes rouées : cette association contradictoire, accusée par le contraste du dessin en réalité fort académique — au beau sens — qui la présente, là, non dans le lubrique des intentions et des poses (si honnêtes au fond !) que git l’obscénité, le choquant de Félicien Rops.

Louis Legrand n’a pas de telles disparates ; il est très pur et très sain : ses danseuses (les Petites du corps de ballet, ou les Danses excentriques) purent venir même après les inconcevables danseuses de Degas ; leur différence les sauvait du périlleux d’une comparaison. Dans cette intimité des gymnastiques féminines de tout ordre, il caquit de notre charpente en mouvement une pénétration précieuse : qui lui facilite depuis d'exprimer d’un chiffre sommaire et précis, avec un minimum d’indications, la caractéristique de nos gestes et attitudes : et ensuite, des attitudes caractéristiques de nos sentiments. Cette ascension du physique au moral, et la signification de celui-ci par celui-là. évite à l’artiste de s’acagnarder dans un procédé, se spécialiser à un type. La Femme de trente ans, les Femmes au balcon (j’intitule peut-être arbitrairement) sont les dissections patientes, cruelles et non féroces d’êtres ravagés et putréfiés par la vie : la fixation du vice moderne et parisien, qu’échoua Rops, est atteinte, ici. Le Mâle (un paysan violente une paysanne) au contraire incorpore, avec simplicité tragique, le pur instinct tout puissant qui jaillit. Le Soir : un père, un pêcheur, embrasse sa femme et son petit sous le décor d’une campagne crépusculaire, d’une mer accalmée ; cette bucolique sait n’être pas mièvre...


GRÈS FLAMMÉS DE DALPAYRAT[1]

J’imagine réalisé mon cher désir : M. Dalpayrat interné dans un bas village, réduit à cuire des pots de grès à treize sous ; que de conditions pratiques à réunir ! Que la cruche pleine, demi-pleine, pleine au tiers, ou vide, équilibre son poids dans le sens de la moindre fatigue au bras et fatigue toujours égale ; qu’uniformément elle s'épanche, sans secousse ; et l’anse toujours bien en main ; et que le goulot, le bec canalisent le liquide en filet pareillement uniforme...

  1. Exposition, 37, rue de Paradis, Paris.