Page:La Revue blanche, t28, 1902.djvu/634

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registres des asiles de nuit et des divers foyers d’hospitalisation, on constate que presque toutes les professions d’ouvrières sont représentées largement. Ci-joint un tableau des professions exercées par les femmes recueillies, en 1897, par les refuges municipaux, l’Hospitalité de nuit et la société Philantropique.

L’Office du travail a donné aussi une statistique au point de vue de l’âge des hospitalisés ; elle comprend 88 100 individus, c’est-à-dire 63 % du nombre total des hospitalisés. Nous relevons en ce qui concerne les femmes

De 17 à 25 ans 
292
De 25 à 40 ans 
1 300
De 40 à 55 ans 
1 123
De 55 à 60 ans 
597
De 70 à 80 ans 
63
Au-dessus de 80 ans 
»
  3 375

Ces chiffres ont une signification importante : on remarque, en effet, que le plus grand nombre des femmes hospitalisées sont aptes au travail au point de vue de l’âge. Si elles ne travaillent pas, ce n’est point à cause d’infirmités ; nous savons aussi que ce n’est point par paresse ni par dégoût du travail [1].

Dans le rapport publié par le Reichstag en 1887, on avoue que les bas salaires poussent à la prostitution : « Quelquefois, les ouvrières de cette catégorie sont forcées par leur vie si dure de chercher un gagne-pain auquel elles répugnaient d’abord. » Le rapport de Posen : « On peut dire sans aucune restriction que le salaire minime et la vie sédentaire favorisent la prostitution, et que réellement ces ouvrières ne mangent que des pommes de terre, quand elles ne sont point des prostituées. »

Du reste, voici un témoignage peu suspect sur la prostitution. Il répond aux risibles flétrissures des moralistes qui accusent souvent le vice, là où il ne faut voir que des fatalités économiques et des infortunes inconnues : « Nous ne croyons pas que la satisfaction des sens et le besoin d’avoir des rapports sexuels avec les hommes doivent être classés parmi les causes sérieuses de la prostitution. Nous avons interrogé des milliers de femmes sur ce sujet et il n’y en a qu’un très petit nombre qui nous aient dit avoir été poussées à la prostitution par une ardeur génésique qu’elles tenaient à satisfaire. Beaucoup, dira-t-on, n’ont pas voulu avouer ce motif ? Bien que les filles qui se livrent à la prostitution manquent souvent de sincérité, nous croyons que, sur ce point, elles ne cherchent pas à tromper. Lorsqu’elles ont des besoins génésiques, elles ne s’en cachent pas ; elles mettent au contraire un

  1. Voir le chapitre sur le chômage dans mon livre Les Superstitions politiques et les Phénomènes sociaux (Stock) 2e édition.