Le collège ! première prison, lit de Procuste universitaire, entraînement pour les casernes, petite société si laide qu’y germe la Société.
Et d’ailleurs, comment s’isoler, faire revivre le passé, imaginer des guerriers, des chars dans ces arènes… près d’un tramway ? Comment rêver le paganisme dans ces temples surgissant des fouilles et où des cierges orthodoxes ont pour vestales des Saintes-Vierges peinturlurées dévotement.
Je n’accompagne pas les Anglais qui s’en vont, munis d’un Bædecker, se pâmer à la vue de blocs informes pour le seul motif que ces débris sont catalogués sur leur guide. Ils n’en ratent pas un de ces débris, pas une ébauche mutilée, ils traînent une main palpeuse sur les mosaïques des thermes :
Socrate a passé par là !
Je fréquente peu les musées cliniques : vénérables morceaux de statues, bras de Vénus, jambe d’Apollon, torse étiqueté — toute la Grèce chirurgicale !
Autant s’imposent à mon sens les œuvres dont subsiste encore l’essentiel harmonieux, œuvres primitives, triomphantes dans l’esthétique de synthèse, autant m’apparaît grotesque la course des amateurs furetant au tas des miettes illustres. Anses d’amphores, éclats de briques, pauvres miettes sous les vitrines… je regarde avec plus de pensées le caillou qui route au ruisseau son éternel vagabondage.
J’étais arrivé en détresse à Athènes.
J’espérais trouver une lettre chargée à la poste. Rien. L’attente dura plusieurs jours.
Je contemplais mélancoliquement, à la porte des restaurants, les petits cochons de lait grillant en les plus réjouissantes poses et je me contentais de portions vagues dans les gargotes suburbaines.
L’ai-je connu, le brouet noir ?
En tout cas je me suis rappelé les philosophes qui jadis couchaient au parvis des temples : un soir je gagnais le Parthénon pour n’en redescendre qu’au matin.
Je dirai pour le bon renom de cet asile sans clientèle qu’en guise de soupe matinale on y jouit d’un régal unique : l’éveil de la campagne blonde frissonnant au pied de l’Hymette.