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LES TABLETTES D’ÉLOI[1]


Je suis libre-échangiste, à ce point que je n’ose pas réclamer, si, dans un dîner mal servi, le domestique aux gants pleureurs, change mon assiette sale contre une autre assiette sale.


— Je vous jure que ce nom restera gravé dans mon cœur.

Eloi : — Bien, bien, madame, nous verrons ça à votre autopsie.


Une personne de ma famille qui revenait à Paris, après vingt ans de travaux forcés, me dit :

— Je trouve tout changé, excepté la littérature d’Armand Silvestre.


Je regarde un monsieur qui me regarde et je me demande avec inquiétude :

— Qu’a-t-il donc à me regarder ainsi ?

Tout à coup : pffff !

Il ne me regardait pas, il regardait dans le vide et mûrissait un rot.


— Faut-il leur offrir une primeur, des asperges, par exemple ?

Eloi : — Ma pauvre amie, tu perdrais ta peine. Ils sont plus riches que nous. Tu penses bien qu’ils ont déjà mangé des asperges tout leur soûl. Ils ne s’apercevraient même point de notre folie. Fais donc simplement une bonne platée d’épinards au croûton, comme tu sais les faire, pas trop hachés.


Je ne connais pas le coup de foudre en amour, mais que de fois, je me suis senti frappé du coup de foudre antipathique.


Voulez-vous me permettre, chère madame, de servir de Milon de Crotone à vos cuisses, tandis que vous laisserez courir sur mon corps les mille-pattes de vos dix doigts ?


Comme les arbres ont maigri, cet hiver !


  1. Seront publiées bi-mensuellement dans La revue blanche.