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LA REVUE DES LETTRES

doute à l’Académie, au titre d’écrivain, est une jolie et spirituelle fumisterie à laquelle tous les gens d’esprit — et beaucoup de sots — ne manquent point d’applaudir.

Le Surréalisme, fils déjà grand du Dadaïsme, mais fils non reconnu, est la plus récente école littéraire. Elle est née surtout de l’éditeur Simon Kra qui voulut, comme la N. R. F., avoir sa chapelle (faite d’ailleurs de transfuges). Il est sorti de ce groupe de savoureuses vaticinations. Mais la création de la vraie littérature « à l’état naissant » tarde un peu, du moins en ses chefs-d’œuvres. Je n’en crois pas moins qu’il y ait là un avenir réel et même riche en talent. Il s’y est créé en tout cas une notion surréaliste de révolte et de mépris des préjugés qui ne manque ni de force ni de saveur. Pour clore, il faut compter, parmi les récents écrivains, des isolés qui feront peut-être école. Ainsi Pierre-Mac Orlan a été pour beaucoup dans la naissance du talent de Paul Morand et de ses disciples. Lui-même œuvre avec, semble-t-il, une sorte de misanthropie âcre qui tient sans doute à quelque secret organique. Ses livres, dont la valeur n’est point contestable, cultivent un pessimisme à la Léopardi peu accessible au public.

Georges Duhamel, qui a débuté sous l’influence de Tolstoï, sera sous peu semblable, en plus pacifique, aux frères Tharaud. Ceux-ci apparaissent désormais comme des spécialistes du compte rendu de missions faites aux frais de la princesse.

Francis Carco doit beaucoup aux écrivains russes. Il a créé un type d’œuvre sombre et violent, qui n’a guère d’équivalent que chez les romanciers catholiques, avec François Mauriac, homme religieux que torture le démon des vices sexuels.

Je n’ai pas cité tous les noms qui peuvent avoir quelque importance, parce que j’écris au courant de la plume et que vous ne me demandez pas de catalogue. Néanmoins, c’est volontairement que j’ai délaissé nombre d’industriels, soit parmi les aînés,