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Page:La Revue du Mois, tome 2, 1906.djvu/104

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L’INSTRUCTION TECHNIQUE DES ÉQUIPAGES DE LA FLOTTE

compétents en matière industrielle : ce fut un grand tort provenant d’une erreur d’appréciation dans la compétence de chacun, car si les réparations des appareils nécessitent des professionnels expérimentés, leur maniement ne réclame par contre qu’un apprentissage très faible ainsi que le commerce, l’industrie ou l’agriculture en fournissent des preuves nombreuses : tout le monde a vu des journaliers très peu techniques se servir de moteurs à gaz, à eau, à vapeur ou à électricité.

Malheureusement, la marine n’a pas suivi cette voie et, comme pour les officiers, elle a préféré ne pas initier ses équipages aux travaux industriels et localiser son enseignement professionnel aux mécaniciens à l’exclusion de tous les autres. Il s’ensuit que, dans chaque service à bord, tout ce qui est mécanique relève du mécanicien et tout ce qui ne l’est pas relève du marin, d’où un état déséquilibré qui n’existait pas autrefois, alors que chaque service était chargé de tous les appareils qu’il utilisait.

Aussi voit-on aujourd’hui le canonnier pointer un canon, tandis que la tourelle est actionnée par le mécanicien ; de même le fusilier arme les pièces d’artillerie légère, mais on le déclare inapte à manœuvrer les monte-charges qui lui apportent les munitions ; les charpentiers sont bien chargés d’éteindre un incendie, mais les pompes affectées à ce rôle sont aux mains des mécaniciens. Il en est de même des timoniers qui aujourd’hui sont déclarés inaptes à mettre en place une lampe électrique de signaux ou d’appartement, bien que celles-ci soient beaucoup plus simples que les lampes Modérateur qu’elles ont remplacées. Enfin les torpilleurs n’ont pas à manœuvrer les dynamos dont ils utilisent l’énergie, et les torpilles elles-mêmes sont confiées aux mécaniciens. D’une façon générale, tous les apprentis apprennent machinalement les soins à donner au matériel, mais on se garde bien de leur donner sur l’entretien ou les propriétés des métaux des indications générales susceptibles de les guider dans les cas connus ou imprévus.

On voit, par cet exposé rapide, que l’enseignement maritime a de graves défauts. Par sa théoricité, il place l’abstrait avant le concret, et ce vice a deux inconvénients : il fait perdre